L’œuvre
de Francis Bacon* fût nourrie d’images et plus particulièrement de
photographies, de photogrammes cinématographiques et de reproductions
d’œuvres d’art. «La Chambre Noire» publiée en septembre 2006 (Editions
Acte Sud) est, à ce titre, un ouvrage plus qu’éloquent : s’appuyant sur
un inventaire quasi archéologique des traces de l’atelier, il restitue,
preuves à l’appui, les sources iconographiques du peintre et permet
surtout de nous faire comprendre comment ce matériau a fortement marqué
plusieurs de ses toiles majeures. Dans ces archives inédites (en partie
tout au moins) se croisent tantôt des figures historiques, tantôt les
références de l’art, tantôt encore l’intimité de l'artiste.
Dévoilant
les documents ainsi que l’utilisation récurrente de certains détails
qui ont contribué au processus de création de l’œuvre, l’auteur de cet
ouvrage, Martin Harrison, déplie ainsi un pan de l’univers de Francis
Bacon.Coïncidence, je tombe hier, sur un article du Monde qui présente une rétrospective au Muséum Frieder Burda
de Baden-Baden, de l’œuvre du peintre allemand Gerhard Richter, autre
artiste qui utilisa l’image photographique comme point de départ de
nombreux travaux. Sur le site très complet de l’artiste, une rubrique présente la totalité des planches de l' Atlas, ensemble des documents collectés ou réalisés par l’artiste et parfois utilisés pour élaborer ses peintures. Cet album-carnet,
véritable mémoire des coulisses du travail, fil conducteur de la
réflexion de Gerhard Richter, témoigne de la part immergée de l’iceberg.
G. Richter, The Atlas, Planche n°13, 1964 / G. Richter Secrétaire, 1964
La
question qui ne manquera pas de se poser, est celle de l’importance
(voire de l’influence et des conséquences) de ces sources
photographiques dans les productions picturales du 20e siècle, même si,
on le sait, cette utilisation se fit presque aussi tôt après son
invention : Ingres, Delacroix, Degas, pour ne citer que ceux-là, ne s’en
privèrent pas...
L’effet
de prélèvement chez Bacon ou de citation à peine décalée chez Richter,
les rivalités outrancières des portraits hyperréalistes de C. Close,
l'affadissement des univers urbains de G. Fromanger, l’usure mécanique
des icônes et des idoles de Warhol, et bien d’autres partis pris
plastiques, montrent à quel point, loin de représenter la menace que
craignaient les peintres académiques du 19e, la photographie, comme
réservoir de formes et d’idées, a été totalement intégrée aux questions
esthétiques contemporaines.
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* Voir d'autres articles concernant Francis Bacon : Croqueur [...] de Papes, De chair et de couleur, Corrida en chambre
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(article initialement publié sur appeau vert overblog, le par ap)
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